Partage ton errance

C'était un jardin...

       

          C'était un jardin si enchevêtré, où la ronce poussait souveraine, que le pas  avait peine à progresser.    Un jardin que la lumière pourtant caressait  de ses rais, quand l'automne proche  tissait  déjà d'or et de flamme la voûte des chênes, quand les écureuils s'y faufilaient  graciles et insolents. 

 

           La barrière, souvent malmenée, avait perdu son pêne et ne se pouvait plus se fermer. Elle battait au gré des vents, ceux d'été,  fruités de sève et de sang ,  ceux d'automne, incertains et mélancoliques… peut être que l'hiver viendrait mettre un terme au battement incessant de ce cœur ?

 

        Quand vous vouliez retrouver le chemin, il vous fallait alors écarter  les  noires orties aux dents acérées  et la funeste ciguë offrant à votre main sa tentatrice corolle déployée, se glisser sous les frênes nacrés.  Et derrière la haie blonde des tilleuls,  là où la pierre  avait repoussé l'herbe, la sente renaissait. Elle se faisait soudain accueillante,  primesautière, un peu mystérieuse quand elle serpentait entre les bosquets que Septembre  dénudait déjà. Elle menait à ce petit point d'eau solitaire, tout au bout de ce jardin, pas même une mare, juste quelques larmes du ciel qui refusaient de disparaître  ou  peut être le souvenir d'une source  qui bruissait encore.

 

          Et c'était là, entre la menthe bleue qui se tavelait  déjà  et les herbes sauvages,  l'explosion de la dernière floraison,  celle qui s attarde aux portes de l'automne, éclatante et grandiose, fragile et éphémère : les asters à la corolle étoilée, les mufliers aux lèvres pulpeuses , la tendresse  rose d'une anémone , le feu du chrysanthème naissant ,  la superbe des dahlias chatoyants, le regard étonné des duveteuses pensées… tant de fleurs étroitement enserrées en cette percée lumineuse et fraîche, blotties les unes contre les autres, comme pour se protéger des premiers frimas qui descendraient, un soir, quand on ne s'y attendrait pas , comme descend le milan qui plonge sur sa proie.

 

            Plus loin, là où le caillou reprenait déjà ses droits, dressé vers le ciel  éclatant de lumière, plus rouge que rose,  un althæa dressé vers le ciel,  semblait attendre la  future averse qui viendrait perler de diamants sa corolle. Et le liseron  de ses volutes blanches et roses ourlait déjà sa tige frémissante.

           

            C'était un jardin aux portes de l'automne, qui ignorait encore tout de l'hiver qui viendrait le blesser  et qui s'offrait à nos regards dans la lumière irisée de nos rêves.

 

                                                               @clorinda.

 



01/03/2011
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